Charlie DALIN
SKIPPER DE L’IMOCA APIVIA
- 2e – Vendée Globe 2020-2021
- Vainqueur – Transat Jacques-Vabre 2019
- 3e – Solitaire du Figaro 2018 et 2017
Charlie Dalin skipper de l’IMOCA APIVIA, était l’invité d’honneur de cette édition.
Il a notamment remis les trophées de la Palme Expérience Citoyen aux lauréats et a partagé sa vision du « LIEN » : thématique de l’édition 2021
Qu’évoque pour vous la notion de « LIEN » et plus particulièrement aujourd’hui dans ce contexte de crise sanitaire si particulier ?
Je pense que le lien est quelque chose qui se créé mais ne se fabrique pas.
Assez paradoxalement, j’ai le sentiment que tout le monde est lié par un lien fort pendant cette crise sanitaire : vivre une situation totalement inédite, bousculant tous nos repères et toutes nos habitudes.
Cela a créé du lien entre voisins, entre générations, entre certaines entreprises, via l’entraide ou juste par le fait de vivre tous ensemble cette même situation.
Comment un navigateur, un sportif de haut niveau comme vous, peut-il réussir une course en solitaire sans lien avec ses équipes, sa famille ?
La notion de lien existe même quand on fait de la course au large en solitaire.
Tout d’abord via les moyens de communication actuels, qui rendent ce lien plus tangible mais il a toujours existé.
Le lien existe avec l’équipe. Dès la genèse du projet, nous embarquons dans une aventure collective, avec des choix réfléchis ensemble, des heures de discussion pour dessiner et concevoir un bateau, mais aussi pendant la construction. Le lien s’intensifie dans la difficulté mais aussi dans la victoire.
En effet, lors de mon avarie sur le VG2020, j’ai vraiment cru que l’aventure s’arrêtait là. Mais c’était sans compter sur mon lien avec l’équipe, qui s’est démenée pour trouver une solution ; pour moi et pour le projet.
(N.D.L.R : Réparer la cale basse de foil pendant le Vendée Globe paraissait impossible, mais grâce au lien avec l’équipe, c’est devenu possible)
Ce lien avec l’équipe est d’ailleurs primordial car une réussite en solitaire se construit à plusieurs mains et plusieurs têtes pensantes.
Pouvez-vous nous retracer les expériences qui vous font penser à cette notion de LIEN ? Avec qui ? Quoi ?
Lien avec les éléments : évoluer avec la mer, le vent, les changements de fuseaux horaires.
La mer et le vent sont des éléments indomptables. Il faut s’adapter à eux en permanence, accepter leurs changements.
Au fur et à mesure des jours de navigation, un lien inexplicable se créé entre le bateau, le marin, et les éléments. Chacun essaye de dompter l’autre tout en respectant la force et l’utilité de chacun.
Lien avec la faune : la notion de risque avec les cétacés, de bonheur avec les dauphins. Anecdote : le vol d’un albatros pendant des heures aux côtés d’Apivia.
C’est certainement sur le Vendée Globe que le lien avec la faune est le plus important. Quand la solitude s’installe, chaque espèce vivante rencontrée est vécue comme un moment de joie à bord du bateau. J’ai vu des baleines, des albatros … et un
lien se créé avec ces animaux. Nous sommes chez eux, nous ne faisons que traverser et nous respectons leur habitat.
Lien avec le bateau : fruit d’un travail collectif où Charlie s’est énormément investi pour ce 1er tour du monde, une première pour Charlie et Apivia.
Anecdote : les sons du bateau communiquent de nombreuses informations à Charlie.
« Avec le bateau, je suis en totale osmose. Je le connais par cœur, j’ai créé un lien fort avec lui sur le Vendée Globe. Je reconnais chaque son, chaque craquement. Cette connaissance est d’ailleurs très importante pour identifier un quelconque problème qui serait en train d’arriver.
Le lien avec le bateau est d’autant plus fort que nous ne faisons qu’un.
Il doit arriver entier pour me ramener et je dois en prendre grand soin. C’est un lien fort entre un homme et une machine, qui est votre seul repère, refuge, pendant plus de 80 jours. »
Si l’on regarde l’étymologie du mot “Lien”, on trouve une “attache constituant une entrave”, et aussi les liens du sang, la parenté qui unit les membres d’une famille :
Pensez- vous que le lien avec les marques n’est pas aussi un moyen pour le consommateur de devenir un membre de la famille, un acteur par son influence grandissante sur le fonctionnement et l’organisation des entreprises ?
Créer du lien avec le consommateur est bénéfique à bien des égards. Tout d’abord car le consommateur se sent impliqué, écouté. Cela est bénéfique à son expérience. Ensuite, le lien créé avec le consommateur est aussi bénéfique à l’entreprise, qui a un retour sur son produit, des idées de développement et peut ainsi influer sur la satisfaction de son client.
Quelle vision, quels conseils pouvez-vous nous partager sur le futur des organisations des entreprises où l’on parle actuellement de lien virtuel, de télétravail, de bureau partagé en roulement… y croyez-vous ?
Selon moi, le lien virtuel peut exister, si tant est qu’une expérience physique a d’ores et déjà eu lieu.
Le lien se crée dans l’échange, le partage, l’association d’idées. Sans échange avec les clients, il est difficile de créer du lien.